Krivoshokov, Semyon Prohorovith
Un soir d’automne, j’ai entendu à la radio une histoire. On parlait de l’ancien directeur de l’école du village de N-Volpa. Ses collègues et ses anciens élèves parlaient avec une grande tendresse et une tristesse d’un homme extraordinaire qui venait de décéder, d’un homme qui était à la fois bon et exigeant, gai et sérieux, d’un homme honnête et juste. On parlait d’un exellent professeur qui savait chanter, jouer de l’accordéon et qui était un acteur remarquable. J’ai eu la gorge serrée. On parlait d’un homme que je connaissais depuis mon enfance, de mon arrière-grand-père Krivochtchekov Semien Prokhorovitch. Il était mon adorable arrière-grand-père, bon et plein de sollicitude. Il faisait ce qu’il voulait de ses doigts : raboter, scier, clouer, coudre, peindre, bêcher... Il dessinait bien, il connaissait la littérature et la musique, il parlait bien allemand, il s’intéressait la photographie et il comprenait bien la politique... Il savait beaucoup et il était un aimable causeur : il savait écouter et il parlait bien. Il avait des choses à raconter... Il est né le 14 septembre 1923 au village de Tchinagort dans la famille des paysans. Il était le quatorzième enfant dans sa famille. En 1931 Semien est entré à l’école primaire d’Arhangelsk. Il faisait très bien ses études et il était toujours parmi les meilleurs élèves de sa classe. Son maître d’école préféré était Kirill Savvitch Krivochtchekov, directeur de l’école qui a joué un rôle important dans la vie de mon arrière-grand-père ainsi que dans le choix de sa future profession.
Il est né le 14 septembre 1923 au village de Tchinagort dans la famille des paysans. Il était le quatorzième enfant dans sa famille. En 1931 Semien est entré à l’école primaire d’Arkhangelsk. Il faisait très bien ses études et il était toujours parmi les meilleurs élèves de sa classe. Son maître d’école préféré était Kirill Savvitch Krivochtchekov, directeur de l’école qui a joué un rôle important dans la vie de mon arrière-grand-père ainsi que dans le choix de sa future profession. Semien a participé à l’alphabétisation du peuple dans son village natale dans les années trente. En 1938, Semien a très bien terminé l’école et il est entré à l’Ecole pédagogique, puis à l’Institut des enseignants de Koudymkar. A cette époque-là il a commencé à s’intéresser le vélivolisme, il rêvait d’être pilote et d’entrer à l’Ecole d’aviation. Mais comme il n’y avait pas d’admission dans cette école, on lui a proposé d’entrer à l’Ecole militaire des conducteurs de char de Kazan. Il y est entré au printemps 1941. Le 22 juin 1941 la Grande Guerre nationale a commencé. En 1943, ayant terminé l’Ecole militaire le lieutenant Krivochtchekov est allé au front. Il était chef de char dans les groupes d’armées de 1 Pribaltiïski, de 2 Pribaltiïski et de Léningradski. Le 11 novembre 1944, non loin de Riga, les fascistes ont touché le char de mon arrière-grand-père et il a été brûlé. Ses papiers, ses documents ont aussi été brûlés. Semien a été commotionné et il a eu une brûlure de II degré au corps. Il a failli périr. Il n’y avait aucun espoir, mais le jeune organisme était fort, il résistait à la mort. Les docteurs étaient étonnés de sa viabilité. Après l’hôpital Semien a retourné au front, mais le 23 janvier 1945 il a été blessé par un éclat d’obus. Pour son courage et sa vaillance Semien a été décoré de deux ordres et de quatre médailles.
Mon arrière-grand-père n’aimait pas, il ne pouvait pas regarder les films sur la guerre. C’était trop dur pour l’ancien combattant. Mais les soirs d’été, il nous parlait de l’amitié des soldats, de l’entraide, du courage des soldats et des officiers soviétiques, de ses camarades perdus au front, de la joie de la victoire... Après la démobilisation de l’Armée Soviétique, Semien Prokhorovitch a terminé l’Institut des enseignants de Koudymkar. En août 1949, il a été nommé directeur de l’école du village de Timino, à 80 km de Koudymkar. La terre boisée... Dans les années cinquante on a créé les exploitations forestières. Beaucoup de gens sont venus aux coupes de bois : les Tatares, les Russes, les Ukrainiens, les Biélorusses, les Lithuaniens... On était mal habillé, mal chaussé, mais on vivait en bonne harmonie. Les enseignants du village faisaient tout leur possible pour le bien de leurs élèves. On organisait des spectacles, des concerts, on chantait, on dansait, on faisait des randonnées... A la fin de décembre 1953 la neige était compacte. Mon arrière-grand-père a fait un grand Père Noël de neige, de 2,5 mètres de la hauteur. Ce Père Noël était très joli, tout le monde l’admirait jusqu’au printemps. C’était un vrai chef-d’œvre de neige ! Du septembre 1957 au juillet 1958 Semien Prokhorovitch a fait ses études à l’Institut pédagogique de Perm, mais il a dû continuer ses études par correspondance à cause de la maladie grave de sa femme, mon arrière-grand-mère. Il a travaillé à l’école du village de Koubeni comme professeur de physique, de chimie, de mathématiques et d’allemand. En 1961 cette école a été réorganisée en école primaire, Semien Prokhorovitch a été nommé directeur de l’école du village de N-Volpa où il a travaillé jusqu’à l’avril 1973. Il parlait de cette école toujours cordialement. C’ étaient les meilleures années de sa vie. Media:Souvenirs d'Ovhinnikona A.F.ogg Il a commencé son travail par la création et cohésion du collectif des enseignants. Le jeune directeur n’avait que 38 ans. La vie à l’école battait son plein, le directeur était toujours au centre des évenements. Il savait tout, il aidait les jeunes professeurs, il leur donnait des conseils, il les dirigeait. Il avait une bibliothèque très riche en livres. Tout le monde pouvait y prendre un bouquin... Les professeurs et les élèves étaient très unis. On a organisé un cercle d’art dramatique, on montait des spectacles, on organisait des concerts, mon arrière-grand-père jouait de l’accordéon... On élevait des lapins, on plantait des pins et des sapins, on faisait du sport, on voyageait... Les professeurs et les élèves ont fondé le musée du premier directeur de l’école Kirill Savvitch Krivochtchekov. Ils ont trouvé beaucoup de photos, de documents, de livres, de cahiers, d’objets d’usage personnel. Ils ont parlé avec des gens qui le connaissaient, avec ses anciens collègues et ses élèves, avec ses parents... Ils ont même fait un voyage à Rjev où Kirill Savvitch avait été tué et où il était enterré. Aujourd’hui l’école de N-Volpa porte le nom de Kirill Savvitch Krivochtchekov. Mon arrière-grand-père était un Pédagogue avec une majuscule. Ses leçons étaient toujours intéressantes. Les enfants aimaient la physique et l’apprenaient avec de l’enthousiasme. Semien Prokhorovitch voulait instruire ses élèves ainsi que leurs parents, enrichir leurs connaissances, élargir leur esprit, élever leur culture. Il était toujours aimable, calme, tranquille, bienveillant envers ses collègues, ses élèves et leurs parents. Il les estimait et respectait infiniment. Et on lui confiait aussi. En 1973 il a été nommé secrétaire du comité du Parti du kolkhoze « Soviet » de la région de Youssva, mais ce travail ne lui plaisait pas. En 1974 il a déménagé dans la région de Rostov et a repris le travail à l’école du village Khomoutovskaïa comme adjoint du directeur et professeur de physique et de mathématiques. Ici il a eu aussi une grande autorité et a gagné la confiance des élèves et des collègues. Ce n’est pas étonnant qu’on lui offrait un grand bouquet de fleurs le 1 septembre, le jour de son Anniversaire et les jours des fêtes des professeurs et des tankistes.
En 1985 Semien Prokhorovitch a pris sa retraite, mais il est resté toujours actif. Il était président du soviet des vétérans de la guerre, il aidait les gens, il visitait l’école... Mon arrière-grand-père était patriote de son pays natal, de la région des Komi-permiaks. Il connaissait bien son histoire et sa culture. Le poète Stepan Karavaïev, le compositeur Alexandre Klechtchin, le poète et l’écrivain Vassili Klimov étaient parmi ses amis. Mon arrière-grand-père venait souvent à Koudymkar, il visitait son village natal de Tchinagort, N-Volpa, il allait voir ses parents, ses amis, ses collègues. Les années ont passé. Mon arrière-grand-père est enterré à Rostov-sur-le-Don, mais il est resté vivant en mémoire de sa fille, de ses petits-enfants et de ses arrières-petits-enfants ainsi qu’en mémoire de ses compatriotes, de ses élèves et de ses collègues.